Les 36es Assises de la traduction littéraire, organisées par l’association ATLAS, s’attaquent cette année à l’Everest des traducteurs : l’humour. Du 8 au 10 novembre à Arles, traducteurs et lecteurs sont invités à voyager entre les langues et les littératures du monde, à partager un parcours de réflexion au gré de conférences, débats, lectures, jeux littéraires et ateliers.
Réputé être l’Everest des traducteurs, la traduction de l’humour est souvent présentée comme une mission impossible. L’humour n’est-il pas intimement lié à l’histoire et à la culture d’une langue ? Lorsqu’on dit de certains peuples qu’ils ont de l’humour quand d’autres n’en auraient pas, n’est-ce pas parce que ce préjugé conduit à traduire les uns et pas les autres ?
Pour Mark Twain, « Expliquer l’humour ressemble beaucoup à la dissection d’une grenouille. On apprend beaucoup au cours du processus mais à la fin la grenouille est morte ».
Face à cet écueil, ces 36es Assises ne tenteront pas d’expliquer mais invitent à explorer, de l’antiquité grecque à nos jours, sous quelles formes l’humour se manifeste en littérature et comment les traducteurs s’y prennent pour en restituer la saveur initiale.
Entre la performance inaugurale du comédien et du metteur en scène Jos Houben, qui reprendra « L’Art du rire », une leçon illustrée sur les lois du comique, au « Chant final » d’Élise Caron, improvisatrice ébouriffante qui sera le grand témoin de ces Assises, en passant par un bref concert de Manuel Rocheman qui interrogera l’humour en musique, ce sont plus de 40 traducteurs, chercheurs et artistes qui sont invités à explorer ce thème.
L’humour doit-il faire rire ?
Rire et littérature convergent naturellement vers le théâtre : Florence Dupont, latiniste très appréciée des metteurs en scène, traductrice des comédies de Plaute et Laetitia Dumont-Lewi, spécialiste de l’œuvre du prix
Nobel de littérature et génial acteur Dario Fo, parleront de la traduction des fausses langues. Deux traducteurs familiers de la scène, Serge Valletti – acteur et auteur – et Pierre Judet de la Combe – philologue et helléniste — confronteront leurs versions des Grenouilles d’Aristophane, une des plus anciennes comédies qui nous soient parvenues. Dominique Reymond, grande comédienne qui fut la Molly Bloom de Joyce aux Assises en 2011, et Martin Ploderer liront Les Derniers Jours de l’humanité de Karl Kraus, monumentale fresque satirique et burlesque écrite au temps de la Première Guerre mondiale, éternellement moderne.
Faire voyager l’humour
Dressant une cartographie de l’humour en littérature, Hervé Le Tellier osera mettre en danger la grenouille, tout en espérant « ne pas emmerder le monde ». Le public sera également invité à goûter l’humour de Sholem Alekheim avec Nadia Déhan-Rotschild, de Cervantès, dont Aline Schulman nous présentera sa mémorable traduction du Don Quichotte, ou de David Sedaris, Woody Allen et Philip Roth avec Nicolas Richard et Steven Sampson.
Les Assises sont aussi écrites par les participants
Des ateliers de traduction aux ateliers d’écriture, en passant par « Le piéton de Philippe III d’Espagne », lecture partagée proposée par Pierre Senges, les lectures caféinées et le juke-box Littéraire de David Lescot, de nombreux moments permettent aux participants de partager leurs coups de cœur ou d’entrer dans la matière.
Cette année, une dizaine d’auteurs et de langues au programme des ateliers de traduction : le verve comique de l’Autrichienne Vea Kaiser dans le roman Blasmusikpop avec Corinna Gepner, l’humour satirique de l’américain David Sedaris avec Nicolas Richard, une chanson pamphlétaire de l’humoriste russe Semion Slepakov avec Yves Gauthier, la résistance passive par la bêtise dans les Aventures du brave soldat Švejk de Jaroslav Hašek, classique de la littérature tchèque, avec Benoît Meunier…
Encore du nouveau
Un atelier de sous-titrage du film « Moi, Tonya », de Craig Gillespie avec Guillaume Tricot.
La conférence inaugurale d’un philosophe fait place à une leçon illustrée sur les lois du comique, par le comédien et metteur en scène Jos Houben.
Les 36es Assises inaugurent une réflexion au long cours sur une question brûlante : l’intelligence artificielle utilisée en traduction.
ATLAS présente samedi 9 novembre à 15h15 au Théâtre d’Arles les premiers résultats de son Observatoire de la traduction automatique, une étude portant sur 40 grands textes de la littérature européenne passés chaque année au crible de trois traducteurs automatiques en ligne. Traducteurs, linguistes et scientifiques décortiqueront les résultats ainsi obtenus. Cette année : Santiago Artozqui – Traducteur et président d’ATLAS, Jean-Gabriel Ganascia – Informaticien et philosophe spécialiste de l’intelligence artificielle, Claire Larsonneur – Maître de conférences en traduction, littérature britannique et humanités numériques à Paris 8.
L’ATLF, prolongera ce débat le dimanche 10 novembre à 9h à la Chapelle du Méjan, lors d’une table ronde professionnelle.
Informations / Billetterie en ligne : https://www.atlas-citl.org/36es-assises-de-la-traduction-litteraire/
Le programme : https://www.atlas-citl.org/wp-content/uploads/2019/09/prog_assises_2019_web.pdf
Contacts : atlas@atlas-citl.org / 04 90 52 05 50